L’impact de L’IA dans le secteur de la communication
À l’air ou l’Humain se doit d’être au cœur des écosystèmes de marque, on me pose souvent la question de l’intelligence artificielle (IA) et de ces enjeux dans le secteur de la communication.
Avant propos :
Avant de vous parler de l’intelligence artificielle (IA), je vais vous parler du métier de créatif. Que ce soit celui de directeur artistique, d’illustrateur et enfin de graphiste.
Ces trois métiers sont complémentaires et pour lesquels il faut plusieurs années de pratique pour comprendre certaines notions. Par exemple, les grilles de composition, le choix et la signification des typographies, ou encore le choix des couleurs. Sur la partie illustration, il faut d’autres aptitudes. Par exemple, il faut une bonne compréhension des morphologies, de la perspective et de l’émotion dans le cadrage.
Concernant la direction artistique, au-delà des compétences techniques, il y’ a des capacités clé comme le management. Pour certains projets ambitieux, il m’arrive de créer des équipes sur mesure. C’est une partie très prenante où il faut être le moteur et le garant d’une qualité humaine et professionnelle. Il faut également penser à l’aspect budgétaire du projet et tenir les délais. Mon travail est de vous orienter vers des profils complémentaires avec un style et une forme qui correspond à vos attentes.
Et l’intelligence artificielle dans la communication ?
C’est à partir de maintenant que nous allons aborde la notion d’intelligence artificielle. Bien souvent, certains créatifs me disent qu’ils réalisent un story-board grâce à des prompts. Les idées sortent de leurs têtes et… Ça s’arrête là. La direction artistique dans le milieu de communication est un peu plus compliquée puisqu’elle nécessite des phases de veille intense. Ceci est obligatoire pour comprendre et s’adapter aux tendances actuelles qui passent aussi par des talents qui en sont à l’origine. Au-delà du visuel et de l’esthétisme, il est capital de décortiquer le sens d’un projet. Que ce soit un logo, une illustration, une campagne de communication ou une publicité.
Donc lorsque je fais un moodboard, je me dois de proposer des concepts avec des références et des sources. C’est un point essentiel pour montrer que cette phase et cohérente et permet de montrer votre implication au projet. Cette phase de moodboard permet de créer des concepts qui seront au cœur de toute création.

Le sens avant l’esthétisme
La notion de sens est le fondement du métier de directeur artistique et l’IA vous permet de tomber dans une facilité d’exécution. Sans forcément passer par cette étape cruciale. La notion de beau dans la communication est subjective et n’est pas très intéressante. Vous n’êtes pas artiste, mais créatif et on veut des idées géniales portées par des talents et des clients de chair et de sang.
L’IA à tout prix ?

Je suis d’accord que c’est beaucoup plus facile de créer un prompts que de démarcher un photographe. Puis, prendre plusieurs rendez-vous pour avoir un rendu quelques semaines après. C’est aussi plus facile que de se former à la photographie et le faire soi-même. Mais avant d’utiliser un générateur d’image, n’est-il pas de mise de s’intéresser aux codes liés à la photographie ?
Vous pouvez-vous poser des questions comme : connaissez-vous des travaux de photographes ou même, avez-vous une appétence pour ce milieu ? Avant de créer une image, avez-vous essayé de comprendre la composition de celle-ci ?
Il en est de même pour la publicité, puisque l’outil chat GPT est dénué d’humour et ne connais pas la rhétorique liée à cet univers. Il n’existe pas de biais de connivence ou de figure de style propre à la publicité (métaphore, allégorie, anaphore.).
Ce que je reproche, ce n’est pas d’utiliser ces outils. Mais je trouve ça dommage de ne plus avoir le goût de l’effort et de l’expérimentation.
L’utilisation des logiciels de création d’images pour optimiser un process induit souvent un manque de réflexion. Ceci, principalement dans le but de gagner du temps. Que ce soit du côté du client, comme du créatif. Le tout, tout de suite, n’est pas un gage de qualité, au contraire.
La seule utilité de l’IA pour les agences dans la communication est souvent liée à la rentabilité. Cela passe par moins de ressource et une optimisation du temps passé à la création.
Je suis donc en contradiction avec cette forme d’IA et ce goût démesuré de la facilité. J’ai l’impression qu’il y a moins d’histoire de marque à raconter. Sauf à nous même…
Et l’illustration dans tous ça ?
Concernant l’illustration, je ne vais pas être tendre et ça n’est que mon opinion. Il y a eu des débordements de la part de maison d’édition, des marques, des magazines et de publicités.
Ce secteur a toujours souffert d’une mauvaise image. Pour beaucoup de personnes, ce métier est une passion et pas un métier.
Mais avant de commencer cette partie, laissez-moi vous donner un chiffre qui va peut-être vous faire réfléchir. En 2019, 75 % des auteurs de bande dessinée installés à Angoulême étaient au RSA. Des personnes qui ont dédié leur vie à une pratique constante et la maîtrise de leur art.
Quand je vois que des municipalité (qui ont un budget communication) ou des maison d’édition leader de leur marché qui utilise l’IA pour leur couverture, ça me rend dingue. Je ne me vois pas acheter un roman illustré par une intelligence artificielle. Ce n’est pas ça correct et respectueux vis-à-vis des lecteurs, comme des auteurs.
C’est à mon sens, un manque de considération pour les auteurs de roman, de bande dessinée et les lecteurs. Lorsque je vois des romans graphiques construits avec une IA, ça me désole. Un dessinateur met entre 6 mois et un an pour faire une BD de 48 pages, alors qu’avec une IA, nous parlons plus de 4 à 6 jours maximum. Dans ce cas, la personne qui construit un projet avec une IA n’a aucune envie de s’investir dans ce milieu. Elle souhaite réaliser un fantasme d’adolescent sans effort ni pratique pour le vendre. Ce que certains n’hésitent pas à qualifier de paresse fondamentale humaine…
Si vous avez un projet visuel, fait appel à une personne qui a les compétences et un style qu’elle a construit au fil des années. De plus, en cas de modification, elle pourra moduler son illustration selon vos souhaits. l’IA dans la communication visuelle a ses limites. Le résultat est souvent une mauvaise copie ou inspiration d’un artiste, mais sans création originale.

Les prochaines cible, le cinéma et les studio de jeu vidéo

Je serais un peu plus bref sur cette partie, car on sort de mon champ de compétence. En 2023, près de 11 000 scénaristes de toutes les industries, on fait grève à Hollywood pour préserver leur droit. Cette grève était aussi contre les producteurs qui voulaient utiliser les IA afin de moins solliciter les acteurs et figurants. Celle-ci permet de scanner des acteurs et des figurants qui seront payés sur une journée. La nouvelle image, scannée, de l’acteur ou de l’actrice, appartiendra aux sociétés de production, qui se réservent le droit d’utiliser cette même image comme bon leur semble.
Il est également question de créer des scénarios de film par un algorithme. Et par la suite, de payer un scénariste pour corriger le fond et la forme. Honnêtement, ça ne devrait pas être l’inverse ?
D’ici 5 à 10 ans, les experts estiment que l’IA pourrait gérer plus de la moitié du développement des jeux vidéo. Elle ne devrait pas seulement améliorer la qualité des jeux et réduire le temps de mise sur le marché, mais aussi créer des expériences plus vastes, immersives et personnalisées.
En 2022, le marché mondial de l’IA dans les jeux vidéo était évalué à environ 1,1 milliard de dollars et il est prévu qu’il atteigne 11,4 milliards de dollars d’ici 2032, avec un taux de croissance annuelle de 26,8% (source)
L’année 2023 a vu le licenciement de 10 500 personnes dans l’industrie du jeu vidéo. Un chiffre qui a augmenté à 11 000 en 2024. Microsoft, par exemple, a fermé Tango Gameworks et Alpha Dog Games, tout en utilisant des systèmes d’IA pour compenser la perte de personnel. Les principaux licenciés reste tout de même les artistes et certain dit conceptuels se retrouvent contraints d’utiliser l’IA pour produire des illustrations, et des formations à l’IA sont imposées au personnel restant.
Pensez plus large, pensez humain
La richesse du métier de créatif et de communicant, c’est aussi la relation que nous entretenons avec les autres. Alors racontons de grandes histoires avec une multitude de talents qui sauront vous mettre en avant par des concepts brillants.
L’intérêt d’un projet sont aussi les contraintes qui le cadre. Il faut savoir que ces contre-règles permettent de contourner la difficulté et de faire naître des projets incroyables.
Je ne vous fais pas de laïus sur le pillage d’œuvres et de style que l’IA produit dans la communication. Vous connaissez la chanson sur le non-consentement des artistes.
Par contre, le sujet actuel qui est important est le nombre de personnes mise sur le carreau. Combien de photographe, rédacteur, graphiste exe sont évincées. Je vous rappelle qu’au début, on nous parlait d’un salaire universel. Puis d’un gain de temps sur les tâches chronophage. On nous expliquait que les IA feraient les choses qui nous ennuient pour nous permettre de retrouver du temps pour nos loisirs (dessiner, lire, jouer…). Finalement, dans cette course à la performance et du profit, la réalité est autre. Les IA mettent en place des process pour faire mieux travailler les humains.
Le dernier facteur alarmant est la surpopulation à laquelle nous faisons face. Qui est en contradiction avec le nombre de personnes qui se font licenciées de leur poste. Notamment les entreprises comme Google, IBM, TIK TOK, et j’en passe, qui ont investi dans l’intelligence artificielle. En janvier 2023, Google avait déjà procédé au licenciement de 12.000 personnes, soit environ 6 % de ses effectifs et soulève déjà des questions sur la sécurité de l’emploi à l’ère de l’IA. Cette entreprise prévoit de licencier 18.000 personnes de plus dans quelques années.
Je trouve aussi dommage que les grandes marques souhaitent créer des humains artificiels pour porter leur marque sur les réseaux ou dans la rue. Nous perdons l’essence même de l’ADN puisque aujourd’hui, ce sont vos consommateurs qui représentent votre marque. L’éthique pour moi est essentielle et je ne me retrouve pas dans ce genre de visuel et discours.

Pour revenir à l’intérêt des outils IA dans la communication
Il va sans dire que cet outil est incroyable, notamment pour les taches techniques pénibles. Je pense au détourage, les mises en situation des projets, les descriptions produits, les débriefe, les corrections d’orthographe… Ce genre d’ouvrage n’est ni créatif, ni intéressant et c’est vrai.
Il permet aussi de confronter des idées et peut optimiser certains process. Pour autant, il ne faut pas céder et laisser l’outil dominer le projet. Encore une fois la problématique de cet outil et qu’il produit le plus amusant et nous laisse le plus pénible, les retouches pour faire en sorte que le visuel colle à la réalité (proportion, nombre de phalanges, expression faciale…)
Je parle bien évidemment uniquement de la partie visuelle et créative puisque je suis convaincu de l’intérêt de cet outil dans la data analyse, la médecine ou le développement web.
Il y a aujourd’hui tellement de nouvelles technologies pour construire un site web que personne ne peut toutes les maîtriser. L’IA est un allié précieux dans ce cas pour maîtriser son code, qu’il soit du HTML, jQuery ou autres. Il n’y a pas de propriété intellectuelle avec langage informatique.
Le problème majeur pour moi et ce qu’on fait avec l’art, l’illustration et la vidéo.
D’autres facteurs dont on parle peu

Un point que je n’ai pas notifié est l’impact de l’IA dans le cinéma et la vidéo. Dans un monde en constante évolution et saturé d’informations, les nouvelles sont ce qui séquence notre aire.
Nous sommes plus confrontés au deep fake jusqu’à les accepter dans des émissions TV (C’est canteloup). Nous devons de plus en plus être vigilants avec tous les témoignages et informations que nous recevons. Je suis papa depuis peu, et je trouve ces deep fake très gênants et de mauvaises augures. La facilité de leur création permet à n’importe qui de créer de la désinformation et manipuler les masses.
Il y a bien d’autres facteurs qui sont pointés du doigt avec les IA générative d’images, comme le respect des normes RSE. Toutes ces images créées ne se font pas du premier coup et son stoker jusqu’à saturation dans des data centers. Ceci devient contre productif pour une société plus responsable puisqu’ils contribuent à la hausse des températures mondiales et au changement climatique.
Une nouvelle étude épingle l’impact environnemental de ChatGPT. Les chercheurs ont estimé que que l’entraînement de GPT-3 aurait consommé 700 mètres cubes d’eau. De manière plus factuel, 25 à 50 questions échangées avec le chatbot ChatGPT nécessitent un demi-litre d’eau. Les modèles plus récents, comme GPT-4, seraient encore plus gourmands en eau.
Le dernier point de ce chapitre est que l’IA manque de crédibilité dans la publicité ou dans la communication. Le grand public ne s’y retrouve pas encore. Elle est principalement utilisée dans le domaine du divertissement sur les réseaux sociaux. Que ce soit pour créer des fake news, des réappropriations culturelles, des teaser de films, fan made ou encore des illustrations d’univers à la manière de… Ceci a pour effet de ne pas crédibiliser les utilisateurs de cette technologie.
Et moi dans tout ça ?
Je pense que vous l’avez compris, je n’utilise pas de générateur d’image de type Midjourney, puisque j’estime que j’ai les compétences d’illustrateur, de graphiste et enfin de direction artistique pour mener un projet à bien. Lorsqu’on me demande des compétences que je n’ai pas, je me rapproche de mon réseau et je m’adapte à la demande.
J’estime être polyvalent dans mes compétences et je n’ai pas peur de l’effort sur un projet qui me fait sortir de ma zone de confort. Au contraire, ça me stimule et m’intéresse davantage à l’idée de découvrir de nouvelles choses/compétences. J’aime mon métier et les challenges qu’il représente.
De plus, je ne vois pas l’intérêt de vous proposer un projet de communication réalisé avec un générateur d’image IA alors que vous pouvez le réaliser en interne. Je pense que mes clients sont tous aptes à créer des prompts et à prendre du temps pour les modifier jusqu’à satisfaction… J’aime apporter du sens, de la plus-value et des compétences que j’ai acquises au grès des années d’expériences.
Enfin, par respect pour la planète et en lien avec mes convictions, je souhaite à mon échelle avoir un impact environnemental minime.
Ma conclusion :
Dans cette course effrénée du désirs des marques d’exister, il va peut-être falloir réapprendre à moins communiquer. Et ce, malgré les promesses des IA dans le domaine de la communication. Apprendre à réfréner ces fantasmes pour préserver notre pollution visuelle, la créativité intellectuelle et nos serveurs rassasiés d’image inutiles.
J’observe depuis plusieurs mois, une création de besoin inutile pour être toujours plus performant et présent pour un algorithme capricieux. Je ne pense pas que ce soit une solution.
Ayons cette intelligence de mieux travailler avec des humains qui nous ressemblent pour co-créer des campagnes intelligentes et authentiques.